Dazibao

La transformation numérique de l’espace public ne conduit pas à la disparition des espaces publics tangibles.

Habermas (1962) dans L’espace public : archéologie de la publicité comme dimension constitutive de la société bourgeoise décrit « le processus au cours duquel le public constitué d’individus faisant usage de leur raison s’approprie la sphère publique contrôlée par l’autorité et la transforme en une sphère où la critique s’exerce contre le pouvoir de l’État ».
Habermas montre comment les réunions de salon et les cafés ont contribué à la multiplication des discussions et des débats politiques, lesquels jouissent d’une publicité par l’intermédiaire des médias de l’époque (relations épistolaires, presse naissante). La notion de « publicité » (au sens de la large diffusion des informations et des sujets de débats via les médias) est un élément phare de la théorie d’Habermas : celle-ci doit être comprise comme dimension constitutive de l’espace public et comme principe de contrôle du pouvoir politique. Pour Habermas, après son essor au XVIIIe siècle, l’espace public « gouverné par la raison » sera en déclin, puisque la publicité critique laissera peu à peu la place à une publicité « de démonstration et de manipulation », au service d’intérêts privés.

Le dazibao (littéralement « journal à grands caractères ») en Chine est une affiche rédigée par un simple citoyen, traitant d’un sujet politique ou moral, et placardée pour être lue par le public. Par extension, et au sens figuré, le mot est employé pour désigner des publications non officielles. Les dazibaos ont été des éléments clés de la révolution culturelle lancée par Mao Zedong en 1966. Les dazibaos furent bientôt très répandus, utilisés pour tout, du débat sophistiqué au divertissement satirique et à la dénonciation enragée.

L’objet du module est de mener une réflexion sur des outils qui permettent la réappropriation de la “publicité” des idées dans l’espace public non numérique.
Comment le designer peut-il provoquer la prise de parole et diffuser cette parole dans l’espace public non numérique ?
Ces questions croisent celles de la captation de l’attention dans l’espace public au sens large du terme cette fois (numérique & non numérique).
En effet : “Dans nos sociétés offrant un accès virtuellement illimité à l’écrit, au son et à l’image, le « temps d’attention » apparaît comme la nouvelle rareté en passe de reconfigurer les lois de l’économie et de la politique.” Yves Citton

Ce module permet de mener un double travail de réflexion et de recherche.
Axe 1. Créer des structures autonomes déployables (et démontables/ réutilisables) dans l’espace public qui permettent de publier de la parole publique.

Axe 2. Permettre au public d’accéder à des outils de “publicité” / publication créés par des designers et ré-appropriables par les usagers.