La suite de l’atelier le 26 janvier 2018 à Guynemer.

Seulement 5 petites filles sur les 8 reviennent à l’atelier la semaine suivante : certains professeurs sont absents donc certains enfants sont rentrés chez eux. L’une d’elle ne veut pas continuer et préfère participer à l’atelier d’Élisa juste à côté.

Nolwenn a installé un endroit spécifique pour le tournage du “film”. Il y a un bras pour tenir le téléphone, il est face à la fenêtre pour avoir une bonne lumière et éloigné des autres enfants. Celle qui raconte l’histoire peut être tranquille, un peu à l’écart, car les filles sont assez timides et n’osent pas se lancer de peur d’être jugé. Laury montre l’exemple qu’elles ont tourné la veille avec Nolwenn, avec le même dispositif. Nolwenn leur propose de manière de procéder : soit en laissant le téléphone fixe, sur le bras, et en bougeant les personnages, soit en bougeant le téléphone et ce sont les étudiantes qui bougent les personnages.

L’une des petites filles est très motivés et raconte plusieurs sont histoire, en la changeant, en ajoutant des personnages et des lieux. Elle essaye les différentes manières. Une, plus timide, raconte son histoire une fois. Une autre en raconte une mais veut en faire une autre avec de nouveaux personnages. Les étudiantes les accompagnent et les encouragent quand elles filment. Elles les incitent à venir plusieurs fois pour filmer et expérimenter. Certaines filles viennent s’ajouter et test d’autres manière de filmer. Elles bougent le téléphone et veulent voir ce que ça donne. Elles expérimentent beaucoup.

Certaines petites filles veulent continuer mais c’est la fin de l’atelier. Nolwenn leur demande si elles ont des téléphones ou des tablettes chez elles. Certaines disent oui, elles pourront continuer chez elle. “ Oui, je vais continuer chez moi, en plus j’ai un grand téléphone !” dit Kelva.

Elles souhaiteraient montrer leur films à Nolwenn la prochaine fois. “On pourra avoir les films qu’on a fait?” demande Habiba. Nolwenn va transmettre les films à Fathia, responsable du périscolaire, pour que les filles puissent les récupérer et le montrer !

Ne pas être face à la caméra et avoir un support de narration, les illustrations, ont permis aux enfants de raconter des histoires très personnelles sans être directement impliqué dans l’image. Cette atelier démontre comment l’image peut permettre une certaine liberté d’expression. Cela n’a pas fonctionné avec toutes les petites filles, mais certaines se sont vite prises au jeu ! Il aussi très encourageant qu’elles souhaitent continuer par la suite !

(vidéos à venir)

« Raconte ton Quartier »

Premier atelier réalisé par Nolwenn à l’école Guynemer ce 19 janvier 2018.

Cet atelier est prévu pour une dizaine d’enfants, âgés de 6 à 10 ans.

Pour ce premier atelier, Nolwenn souhaite tester les moyens de raconter une histoire de manière visuelle, comme une manière de faire du scénario.

Il se trouve que dans le cadre du périscolaire en primaire, les téléphones portables sont interdits aux élèves, il est donc compliqué de les faire filmer sans matériel professionnel de cinéma. Cependant il est possible de leur faire créer de l’image.

Elle propose un sujet assez simple mais qui reste ouvert pour laisser une liberté d’expression aux enfants : raconter son quartier. L’idée initiale est de proposer aux enfants de créer une histoire en petit groupe de 2 ou 3, en utilisant des illustrations qu’elle a conçu en amont. Le but est de construire un décor et de choisir des personnages, en piochant dans les illustrations, pour raconter son histoire. Ensuite, chacun se répartit les rôles dans le groupe, celui qui cadre (avec des visionneuses pour mimer l’écran d’un téléphone) et celui ou ceux qui font les acteurs. Ensuite les groupes filment l’histoire créée, en utilisant les illustrations.

Nolwenn a décomposé l’atelier en étape afin d’aider à son déroulement :

  1. faire des groupes de 2 ou 3.
  2. choisir un personnage
  3. construire le décor
  4. raconter le quartier avec le personnage et le décor
  5. répartir les rôles : qui joue ? qui cadre ?
  6. jouer l’histoire

Nolwenn travaille à l’école avec un groupe de 8 filles, dont les âges semblent aller de 6 à 10 ans. Elle leur présente l’atelier et dès le départ, chacune se met seule pour construire son histoire. Aucune n’habite dans le même quartier, Nolwenn essaye de voir s’il est possible de faire des groupes mais elles refusent. Chaque enfant commence par choisir un personnage puis construit son décor. Elle leur propose des feutres afin qu’elles puissent s’approprier les illustrations. L’étudiante se rend vite compte que cette étape leur plaît beaucoup, elles se mettent à colorier leur personnage pour qu’il leur ressemble, à colorier les immeubles… Laury et Cécile, les deux étudiantes qui l’accompagnent, participent aussi à l’atelier.

   

Elle réalise que certaines n’ont pas compris l’atelier. Il est vrai que Nolwenn a donné toutes les consignes rapidement et de manière confuse. Il serait peut-être plus constructif de proposer un atelier plus simple, ou avec des étapes intermédiaires. Pour de prochains ateliers, il faudra prévoir un temps où elle explique plus simplement et où elle s’assure que les enfants ont bien compris l’atelier, quitte à les faire réexpliquer ou à le simplifier.

Nolwenn leur explique que leurs productions seront filmées mais pas elles. Elles semblent soulagées de ne pas passer devant la caméra. L’étudiante voit aussi qu’elles bloquent au niveau de l’histoire. Elle leur propose alors des pistes en discutant avec elles : parler de quelque chose qu’elles aiment, qui leur manque dans leur quartier ou encore une anecdote rattaché à ce lieu ou des personnes qui y vivent… Laury propose une histoire et Nolwenn se rend compte de l’importance de l’exemple pour débloquer la création. Partir de rien peut être déstabilisant.

Nolwenn les laisse finir leur décors et leur propose de revenir la semaine prochaine pour continuer l’atelier et filmer leurs histoires. Elles sont toutes partantes pour continuer, ce qui est très motivant.

 

Une des filles commence à raconter une histoire. Nolwenn fait plusieurs tests avec elle, d’abord en filmant elle-même, puis en faisant bouger les personnages par l’enfant, puis en la laissant filmer. Certaines lacunes ressortent de ce premier de film. Premièrement, il est trop compliqué de gérer le film et l’animation des personnages par une seule personne. Cela peut bloquer les enfants. Il faut aussi proposer un espace dédié à la prise de vue.

La prochaine fois l’étudiante ramènera un statif pour fixer le téléphone afin de tester un premier temps où les enfants n’ont qu’à gérer les personnages dans un cadre fixe, et où elles peuvent filmer seules.

Puis un deuxième temps où celle qui raconte l’histoire filme et les autres enfants animent les personnages. Cela permettra de voir comment s’effectue la collaboration et comment chacun réagit à son rôle. L’étudiante prévoit aussi des exemples de films avec les réalisations de Laury et Cécile à montrer en début d’atelier. Ce sera le moyen de voir si un exemple leur permettra d’oser faire, de tester et de jouer avec le matériel proposé ou bien de copier l’existant.

La suite le 26 janvier à Guynemer.

(vidéos à venir)

Atelier « On s’en tamponne »

Premier atelier pour Elizabeth à l’école Guynemer ce 19 janvier 2018.

« On s’en tamponne » propose une réflexion créative autour des motifs textiles alsaciens traditionnels. À partir de cartes avec ces motifs, les enfants doivent les recréer, avec les tampons mis à leur disposition.

Les cartes présentent des dessins d’une sélection de motifs, mettant en avant leurs caractéristiques visuelles.

Les tampons quant à eux, sont des décompositions de ces motifs. Une trentaine de tampons permettent de composer les motifs traditionnels.

Deux couleurs d’encreurs sont disponibles, le bleu et le rouge, en écho aux couleurs utilisées traditionnellement pour tisser le kelsch.

Un groupe de 8 filles âgés de 8 à 10 ans se prêtent au jeu. Deux consignes leur sont données. Premièrement, à partir d’une carte à motifs et des tampons à leur disposition, elles doivent recréer, en interprétant avec un peu de liberté, ce qu’elles voient comme dessin. Deuxièmement, elles tamponnent leur carré de tissu comme elles le désirent, recréant ainsi leur motif, à partir d’images alsaciennes.

Les filles apprécient ce premier atelier mené par Elizabeth, et proposent beaucoup d’assemblages et de motifs, c’est encourageant ! Elizabeth leur propose de ramener leurs échantillons la semaine suivante, pour qu’elle ait le temps de les utiliser, ou tout du moins de les scanner pour s’en servir dans le futur.

 

Jean-Noël, un super-héros à sa manière.

Jean-Noël est un jeune garçon de 11 ans, atteint de la maladie génétique de la drépanocytose. C’est la maladie génétique la plus répandue dans le monde mais pourtant elle reste encore à ce jour méconnue.

Pour Jean-Noël, sa maladie demeure une spécificité et la voit comme un pouvoir magique qui lui permet à lui et son corps de lutter contre le paludisme et se compare à super-man, un super-héros avec de supers pouvoirs mais qui a des faiblesses en présences de la kryptonite.

La drépanocytose s’est en effet manifestée au départ de manière à ce que les personnes la détenant puissent s’auto guérir et lutter contre le paludisme présent au départ dans les régions d’Afrique et en Inde. Mais à présent, avec l’expansion de la population, la drépanocytose s’est répandue dans une grande majorité du monde.

Malgré qu’ils soient nombreux à détenir ce super pouvoir, Jean-Noël se sent seul et incompris. Les douleurs que celle-ci provoque sont indescriptibles et pour le moment incurables. Il existe aujourd’hui encore aucun traitement, mais des avancées comme la transfusion de sang durant une hospitalisation permet de soulager certaines de ces crises.

Jean-Noël a aujourd’hui 11 ans, il a de la chance et il le sait, car beaucoup d’enfants drépanocytaires (80%) ne dépassent malheureusement pas l’âge des 5 ans à cause de simple chose comme des petites infections, le rhume, la bronchite, d’anémie ou du manque d’oxygène dans les tissus.

Jean-Noël ne s’est pas trompé, il est donc bien un super-héros, à sa manière. Il est fort, courageux, il lutte contre une maladie qui nuit à sa santé et engendre des complications sur sa vie quotidienne. Heureusement il a sa famille. Mais comme il le dit, il se sent parfois quand même seul.

Jean-Noël s’interroge si la méconnaissance de sa spécificité ne joue pas un rôle sur sa solitude et pense qu’il faut en parler pour ainsi peut-être améliorer sa condition et celles de ceux qui sont dans le même cas.

Alors la clé d’une avancée concernant cette maladie serait certainement la communication et peut-être un lieu, un repère où ces supers-héros d’aujourd’hui pourraient se replier.

 

LA MUE DES MUSÉES – ÉLISA GUILLET

Au fur et à mesure que j’approche, tout se dévoile. Ils apparaissent peu à peu à travers ces surfaces, ces voiles presque insaisissables et pourtant si matériels, qui les protègent eux, comme des coques invisibles, le blanc translucide de l’œuf gardant précieusement le jaune en son sein. Les postures de ces coques en feraient presque des corps animés. Elles sont perchées sur leurs jambes, tantôt élancées, en fragile équilibre, tantôt ancrées dans le sol, courtaudes et sûres d’elles.

Je cherche, je m’approche, j’épie l’objet de ma curiosité. Je tourne autour, je passe en dessous, je chemine à travers, je m’en éloigne même parfois pour en saisir toute l’ampleur. Ce paysage lunaire est comme une île, ou plutôt un glaçon rafraîchissant au milieu de la frénésie urbaine; un glaçon qui contraste mais qui se fond aussi avec son environnement et l’influence.

On peut alors déceler le fil rouge, le lien qui unit ces éléments hétéroclites, dispersés dans l’imaginaire collectif, qui sont, pour un temps, tous rassemblés comme pour une réunion de famille. Chaque élément ici fait écho à un autre, ils dialoguent, se répondent, ou s’affrontent, se complètent, se rassemblent, se toisent, s’ignorent parfois.

Personne n’est encore là, j’en profite pour m’étendre. Une pause est nécessaire pour faire un arrêt sur image. Tous mes sens sont sollicités, j’en ai perdu la notion du temps et il me faut une seconde pour me rappeler où je suis. Je lève la tête doucement, je reconnais les maisons alentours, l’air frais fait voler des feuilles qui viennent glisser sur la voûte imagée qui me surplombe.

Du coin de l’œil, je repère le même motif sur un tableau que celui qui se trouve au dessus de moi. Je me relève et avance vers ledit tableau, quand je remarque que je longe ce même motif, traduit en relief cette fois. Pas de couleur, pas la même échelle, mes doigts l’effleurent comme si je pourrais en déceler la matérialité intrinsèque, qui pourtant ne renvoie à aucun des deux autres éléments susnommés. Un univers se dessine alors. Des techniques, des représentations, des interprétations, tout ici est multiple et unique à la fois. Les objets, les photos, les dessins me sont tous en un sens familier. Je reconnais des formes globales, des codes colorés, des styles et pourtant je ne les avais jamais vu appliqués, combinés, présentés de la sorte.

Et c’est là toute la finesse de cette installation. Les éléments de scénographie mettent en valeur des éléments présentés tout en ayant leur propre personnalité. Les éléments présentés font écho à des cultures communes, des traditions tout en ayant leurs propres identités.

 

 

Une mémoire d’éléphant – Cécile Dandreïs

 

10 Septembre 2019, 10h. Cela fait maintenant un peu plus d’une semaine que Théo a commencé sa nouvelle année scolaire en classe de CE1. L’année dernière, il a appris à lire et à écrire, il s’est fait plein de copains, quelques copines aussi, et il appréhende désormais son entrée dans la cour des grands. Théo est assidu. L’école ? Il trouve ça marrant, surtout depuis qu’elle lui a appris à lire. Mais le soir à la maison, il n’aime pas faire ses devoirs. Il trouve vraiment très pénible d’apprendre ses leçons. Trop long, trop ennuyeux.

10h. Aujourd’hui la maîtresse a prévenu qu’ils ne feraient pas des maths à cette heure-ci. Dans la classe, tout le monde est installé autour d’un drôle d’ensemble d’objets, on dirait des jeux, mais ça n’en est pas vraiment.

Cette année, une nouvelle discipline est intégrée pleinement au programme de l’enseignement en école élémentaire. Elle n’enseigne pas une leçon particulière, ce n’est ni un cours de français, ni un cours de maths, ni même de géographie. C’est un moment d’expérimentation et d’éveil. Ce n’est pas vraiment un jeu, ni un temps de récréation, mais cette nouvelle activité amuse beaucoup les enfants. Autant qu’elle leur est utile. En effet, désormais une fois par semaine pendant quelques heures, les enfants de chaque classe sont invités à entraîner leur mémoire. Pour cela, des outils spécifiques sont mis à leur disposition sous plusieurs formes dans un kit pratique distribué à la classe en début d’année. Prenant la forme d’une malle en bois – rappelant aux enfants leur caisse à jouets – le kit est séparé en plusieurs compartiments thématiques : entraînement mémoriel, exercices d’application, outils pédagogiques, etc. qui comportent chacun un code coloré et un univers commun s’inscrivant dans un ensemble homogène. Couleurs pastels entrecoupées de couleurs vives, tons de bleus, de rose et d’orange, se mêlent à différentes matières et matériaux; du textile, au papier en passant par le bois, qui suscitent les différents sens des enfants. Plusieurs typologies de mémoires sont alors sollicitées à travers les dispositifs présents dans le kit.  Ainsi, certains peuvent commencer par apprivoiser leur mémoire à court terme, tandis que d’autres expérimentent autour de leur mémoire procédurale, par exemple. Nous trouvons ainsi de nombreux outils : jeux éducatifs, livrets, recueils de blagues, plateaux de jeu etc.

Parmi ceux-ci, les enfants ont accès notamment à un ensemble de  plateaux de jeu en textile, décorés de sérigraphies et de broderies, qu’ils peuvent facilement transporter, et utiliser comme des supports de locis.  En effet, les “plateaux de jeu” permettent de cartographier certaines informations à retenir, à l’instar d’un “palais mental”, technique de mémorisation utilisée notamment par le célèbre Sherlock Holmes, idole des enfants. Tout est très beau et intrigue la curiosité de ceux-ci, alimentant ainsi leur implication. L’ensemble de ces outils a pour vocation de donner une méthode de mémorisation. Mais ça n’est pas une méthode unique. Chaque semaine, un nouvel atelier est organisé autour de ces outils. Le but de celui-ci est d’inviter les enfants à travailler leur mémoire. Tout ce qui est mis à leur disposition les pousse à mémoriser toujours plus. Mais les enfants n’y voient là aucune corvée, puisque tout est mis en oeuvre pour que ce temps d’apprentissage soit le plus ludique possible. Leur humour est sollicité, mais aussi et surtout leur appétit d’apprendre. Toute l’année, les enfants vont ainsi apprendre à entraîner leur mémoire, pour la rendre plus efficace, pour retenir mieux et plus durablement. Tout ça leur sera bénéfique plus tard. Mais si ces outils ont intégré le cadre scolaire, ils ont aussi investis le domicile des élèves. Ils ne sont pas seulement dédiés à l’expérimentation et l’éducation de la mémoire en classe, certains servent aussi à l’apprentissage à la maison. Le soir, lorsque les enfants doivent apprendre une poésie par cœur, par exemple, ils peuvent désormais s’aider des outils qui ont été distribué à chacun en début d’année. Lorsqu’ils seront plus âgés et qu’ils entameront leurs études au collège ou au lycée, et même après, ils auront développé à titre plus ou moins égal, les mêmes capacités de mémorisation. Le but de ce nouveau temps dédié à la mémoire en classe, et des outils mis à disposition pour étudier, est tout simplement d’apprendre à apprendre. Il ne devrait plus y avoir de problème pour enseigner les fondamentaux. Grâce à ces nouveaux outils, les enfants pourront s’approprier leurs différentes leçons et de cette manière, ils auront les aptitudes nécessaires pour développer des capacités de raisonnement pour assimiler les informations les plus complexes. L’échec scolaire devrait considérablement diminuer avec les années.

Génère ton motif – Elizabeth Delphin

Ton assiette est belle, avec ses ondulations colorées. Elle semble sauter de la table par la vivacité des formes qui l’entourent.

Et surtout, le fait qu’elle soit unique lui ajoute une valeur sentimentale. Et oui, unique. Tu est sûre et certaine que personne d’autre n’a la même. Tout comme ta robe aujourd’hui. Celle d’aujourd’hui oui, mais pas celle d’hier je le sais bien. Celle d’hier date encore de l’ancien monde, celui dans lequel tout le monde portait les mêmes vêtements, avec les mêmes formes. Quelle étrangeté tu me diras ! Toi tu n’as pas trop de souvenirs de cette époque. Les tenues et les objets que tu possèdes de cette Histoire passée font office de mémoires et de décorations vintage. Vintage qui revient à la mode, certes.

Mais tu as peur que cette frénésie de ressembler à tout revienne. Toi qui travailles au Ministère des Objets Nouveaux tu le sais : le stock de motifs uniques arrive à épuisement… Comment faire alors ? Puisque nous n’allons tout de même pas revenir à un monde de similitude, ah ca non !

Il nous faut, de l’imagination. Du combinatoire surtout ! Ou mieux ! De nouvelles machines qui connaissent tous les motifs uniques déjà créés et qui peuvent en refaire de nouveaux. Parce que tout le monde le sait, les machines sont meilleures que les hommes pour créer les motifs.

Oui, c’est décidé, tu porteras cette idée demain, au grand designer des motifs uniques de France : B 67.

B 67 est un personnage atypique. Déjà, il vient de l’ancien monde, et il continue de vivre comme si il y était encore. C’est sûrement ce qui le rend si incroyable : il a vu tellement de choses, vécu tant d’événements, il sait tout de l’ancien monde, sa mémoire à lui, n’a pas été altérée.

Quand tu lui présenteras ton idée concernant les nouveaux motifs, fais bien attention à tes tournures de phrases, B 67 a beau être l’inventeur des motifs nouveaux, il tient encore beaucoup à l’ancien monde (comme tu le verras dans son atelier, d’ailleurs fait attention où tu mets les pieds, il y a chez lui un ou deux objets dont il vaut mieux rester éloigné).

Demain est arrivé, et comme prévu, tu te rends chez B 67. Je vois que tu appréhendes un peu la rencontre, mais tu sembles suivre mes conseils à la lettre et tout se passe bien.

Mais, l’inventeur est une personne particulière dont on ne peut jamais prévoir les réactions.

Il s’esclaffe face à ta demande, et te réponds : « Mais quelle idée de vouloir encore créer de nouveaux motifs ! Ne vois-tu pas que toute la cohésion de la société dépend d’objets de ressemblance et de différence ? Si tout le monde est différent, de qui le sommes nous réellement ? Car tu le sais, pour être différent, il faut ressembler. »

Caméras aux poings – Nolwenn Yves

 

Nous avons tous la possibilité de filmer des images de qualité professionnelle avec nos téléphones.

Notre époque nous donne les possibilités de nous exprimer partout et sur tout, notamment avec les réseaux sociaux, par les mots et par l’image.

De plus en plus de personnes s’engagent dans de petites associations ou dans des groupes locaux aux moyens modestes.

Tout ceci constitue le point de départ de Caméras aux Poings. Il existe déjà diverses publications, livres ou site web, afin d’apprendre à faire des films. Il existe aussi des ateliers qui proposent de découvrir des techniques traditionnelles du cinéma comme le montage ou la captation. Certains ateliers proposent des outils alternatifs comme les Pocket Film, pour filmer avec son téléphone, ou les Machinima, pour faire du film à partir de séquences de jeu vidéo.

Cependant quasiment tout ces dispositifs de transmission restent généraux par rapport au Cinéma et surtout restent, en général, proche du Cinéma plus « traditionnel ».

Avec Caméra aux Poings, je souhaite proposer des outils propres aux besoins de militants, en leur proposant des outils d’aide à la réalisation mais aussi des outils pour diffuser et échanger sur leur pratique du film et de la vidéo.

Comment filmer durant une manifestation ? Comment filmer clandestinement, quand on a pas d’autorisation ? Que montrer à l’image ? Comment articuler un discours visuel militant ? Comment construire une histoire ? Et tout ça sans moyens professionnels et sans avoir à passer par une école de cinéma !?

À travers le projet Caméras aux Poings, je vais proposer des outils pour permettre aux militants, individuels ou membres d’une petite association, de réaliser des vidéos pour leurs causes. Que pourront être ses outils : des tutoriels vidéos, des notices de fabrication, des catalogues de posture de film et de grammaire cinématographique simplifié, des boîtes à outils pour des ateliers et surtout une plate-forme web (ou même réelle) pour pouvoir réunir toutes ces ressources et pour permettre aux militants d’échanger et partager leurs créations ainsi que leurs expériences.

Voici le teaser de mon projet, qui montre l’avancement de ma réflexion sur le projet en novembre et décembre 2017.