QUARTIER EN FOCUS

Lien avec le mémoire

Dans le cadre de mon mémoire, je me suis interrogée sur la manière dont le design peut favoriser l’expression des jeunes issus de quartiers populaires périurbains et les inciter à élargir leurs pratiques culturelles. Après avoir effectué diverses recherches, j’ai formulé l’hypothèse selon laquelle la pratique de la photographie peut permettre à ces jeunes de percevoir et d’exposer leurs richesses culturelles individuelles et collectives.

 

Partenaire de projet

Pour mettre en œuvre un projet répondant à cette hypothèse, j’ai établi un partenariat avec le centre social et culturel de la Cité de l’Ill à Strasbourg. Grâce à cette collaboration, j’ai pu proposer des ateliers hebdomadaires aux jeunes de troisième inscrit au CLAS (Contrat Local d’Aide à la Scolarité). Au fil du temps, j’ai réussi à établir des liens privilégiés avec les participants réguliers, mais également avec d’autres jeunes qui nous rejoignaient  au moment des ateliers en extérieur. Mon partenaire m’a accordé une grande liberté dans la conception et la réalisation du projet, ne restreignant pas mes choix. Par exemple, j’ai pu utiliser un mur du centre pour y afficher l’exposition finale.

 

Positionnement de designer

Dans ce projet, j’ai adopté une posture d’accompagnatrice. Mon rôle consistait non pas à dicter aux jeunes ce qu’ils devaient photographier, mais à être disponible en cas de questions ou de demandes, tout en les sensibilisant à l’art de la photographie. Cette approche leur a permis de bénéficier d’une certaine liberté pour s’approprier le travail réalisé. Les photos prises avaient pour objectif sous-jacent de les représenter et de leur donner confiance en leurs productions. Par conséquent, il était essentiel de leur accorder une liberté suffisante afin qu’ils puissent gagner en confiance vis-à-vis d’une pratique qui leur était peu familière.

 

Les étapes de projet

Pour confirmer cette hypothèse, j’ai conçu un projet en trois étapes clés.

  • La première étape consiste à choisir différents lieux emblématiques et à s’y rendre pour prendre des photos. Afin de garder une trace du parcours réalisé, les différents endroits visités ainsi que les photos prises ont été répertoriées sur une grande carte. Au fil des séances, la carte s’est progressivement remplie de photos et est devenue un objet de rassemblement et de discussions pour moi et les participants.

  • La deuxième étape a pour objectif de sensibiliser les jeunes à la pratique de la photographie, notamment à la composition. Pour cela, des sorties photos ont été organisées avec un outil de composition d’image. Cet outil n’a pas pu être exploité sur le terrain dans son intégralité par manque de temps, mais le principe des cadres a pu être testé à de nombreuses reprises. Ces séances étaient davantage encadrées, car il était important de suivre un protocole pour bien assimiler les principes de composition photographique. Ces séances ont été un moyen pour les jeunes d’aller plus loin dans l’usage de l’appareil photo et de prendre plus de temps pour observer l’environnement alentour.

 

  • La dernière étape consiste à réaliser un photocollage sur un mur du centre socio-culturel. Celui-ci est composé d’éléments découpés à partir des photos prises par les jeunes. Il a d’abord fallu poser les éléments prédécoupés au sol pour visualiser la composition sur le mur. Après avoir déterminé l’ensemble de la composition, nous avons fait le mélange pour la colle à papier peint et avons préparé la zone à coller. Le collage à impliquer des participants allant de la primaire à la troisième.

 

Impact à l’échelle du quartier

Lors des ateliers, j’ai rencontré d’autres habitants du quartier. Ces rencontres ont été enrichissantes et m’ont permis de discuter des  personnes de tous âges curieuses d’en savoir plus sur le projet. Certaines m’ont même raconté des histoires et des anecdotes sur leur quartier. Lors des sorties photo, de nombreux jeunes sont venus participer ce qui a permis de faire découvrir la photographie à plus grande échelle. Ces ateliers ont permis de réaliser un projet collectif à l’échelle du quartier, faisant de la photographie un prétexte favorisant les échanges et la dynamique collective.

 

Journal de bord

Après chaque séance d’atelier, j’ai entretenu un journal de bord afin de retracer le déroulement détaillé du projet. Cet exercice m’a fait prendre davantage en compte les évènements qui ne se sont pas passés comme prévu et de réfléchir aux améliorations possibles ainsi qu’à la résolution de problèmes rencontrés. L’entretien de ce journal m’a permis d’élaborer une démarche de recherche-action et de visualiser mon projet dans sa globalité.

 

Mon point de vue personnel

Ce projet a été formateur pour moi. Il m’a permis de gagner en confiance dans mes choix. J’ai fait face à des situations où j’ai dû prendre des initiatives et gérer des groupes seule ce qui n’a pas été facile. Le fait de réaliser un suivi hebdomadaire avec des participants réguliers m’a permis de pousser mes recherches et de comprendre les besoins et envies des usagers. Ces aller-retour entre le terrain et la réalisation en cours ont porté leur fruit et j’ai pu réaliser un projet correspondant aux personnes que j’ai suivies.

 

Réponse à l’hypothèse

Le projet a confirmé l’hypothèse que la photographie à permis à ces jeunes d’exposer leurs richesses culturelles en valorisant de manière significative leur travail. Cette valorisation a revêtu une dimension personnelle et collective, car elle leur a permis de témoigner de leur lieu de vie à travers leur propre regard et de le partager avec d’autres habitants de leur quartier.

L’exposition finale sous la forme d’un photocollage affiché sur un mur du centre social et culturel a été un moment clé du projet. Les jeunes ont pu voir leurs photos agrandies, exposées et visibles de tous les visiteurs. Cette exposition a suscité un sentiment de fierté et de reconnaissance chez les participants. Ils ont réalisé l’impact que leurs photographies pouvaient avoir sur les autres habitants, intrigués par le projet et ont pu réaliser comment le quartier pouvait être mis en avant.

L’exposition a aussi été un bon catalyseur de conversations et d’échanges. Des discussions animées ont émergées, permettant de créer des liens plus étroits entre les habitants du quartier.

Le projet a été une source d’émancipation pour eux, renforçant leur confiance en leurs compétences créatives et leurs capacités à partager des intentions avec un appareil photo. Certains jeunes ont même exprimé le désir de continuer à explorer la photographie.

En fin de compte, ce projet a démontré que la photographie peut servir de puissant moyen d’expression, de valorisation et d’autonomisation pour les jeunes du quartier de la Cité de l’Ill.