Claire-Charlotte

~ RENCONTRE ~

Lundi 5 Décembre, 10h, Rivetoile, Strasbourg.
Rendez-vous avec Claire-Charlotte infirmière en Oncologie-Pédiatrique à
l’hôpital de Hautepierre, Strasbourg.

 
Nous avons retrouvé Claire-Charlotte, que nous avions rencontrée lors de l’École de l’Automne 2016 de Strasbourg, autour d’un café. Elle a pris le temps ne nous expliquer comment fonctionne le service et l’hôpital où elle travaille, ainsi que son projet.

Organisation de l’hôpital 

L’hôpital de Hautepierre est géré par le directeur M. Gautier. Il a été choisi par une commission dans laquelle le maire de la ville intervient. Le choix d’un directeur est donc une décision politique. Pour prétendre au poste de directeur d’un établissement de santé, il faut faire une formation spécifique qui se situe à Rennes. Les directeurs hospitaliers sont donc des managers ce qui crée des situations conflictuelles avec le personnel de santé qui se sent incompris.

L’hôpital est une organisation très hiérarchisée. Le groupe paramédical, constitué d’agents de services hospitaliers, d’infirmières, d’auxiliaires de puériculture et d’aide-soignantes, sont la responsabilité d’un cadre de santé qui a le statut d’infirmier. Les cadres santé sont eux-mêmes dirigés par le chef de service qui est un médecin. Les chefs de service sont encadrés par le chef de pôle. L’hôpital est un lieu en constante activité, les équipes se relaient jour et nuit.

 

L’hôpital pédiatrique de Hautepierre

L’hôpital de Hautepierre est le seul établissement pédiatrique de Strasbourg. Dans un même immeuble, il regroupe tous les services pour enfant. Chaque étage correspond à une pathologie et chaque service peut accueillir une quinzaine d’enfants. Seul le deuxième étage est consacré à l’hôpital de jour pédiatrique. Ce service ne permet pas aux patients de passer la nuit à l’hôpital. Les rendez-vous dans ce service sont très longs. Les patients attendent toute la journée en salle d’attente et salle de jeu. Lors de l’accueil des patients en hospitalisation, il existe un livret d’accueil. Ce serait un bon support pour informer les adolescents de la création de quelque chose pour eux.

L’hôpital possède également des intervenants extérieurs notamment des professeurs de sport, des éducateurs de jeunes enfants, des professeurs d’école, des psychologues et des kinésithérapeutes aident le patient à vivre avec sa maladie.

L’hôpital accueille de nombreux patients d’origine étrangère notamment des patients de l’Europe de l’Est et d’origine maghrébine. Cela peut parfois poser des problèmes dans la communication entre les proches du patient et les professionnels de santé. En effet, l’interprète n’est présent que pour les rendez-vous importants. Il ne peut pas intervenir à tous les moments de la journée. Le jeune patient fait donc la traduction entre ses parents et les personnels ce qui le met dans une position difficile.

Un adulte de 18 ans qui arrive dans le service pour adulte a de fortes chances d’être rapatrié dans le service pédiatrie, car il y a un meilleur pourcentage de réussite des soins en pédiatrie. Claire-Charlotte prend d’ailleurs l’exemple d’une jeune fille de 26 ans qui a été hospitalisée en pédiatrie. Cela s’explique par une différence du cadre de vie dans le service pédiatrique et les services pour adultes. Dans le service pédiatrique, les patients ont un meilleur suivi. En effet, il y a une infirmière pour cinq enfants alors que dans le service pour adulte, il y a 2 infirmières pour 20 patients (1 infirmière pour 10 patients). Les horaires sont plus souples et s’adaptent à chaque patient. Les liens entre le personnel pédiatrique et les enfants sont plus affectueux, car les enfants restent hospitalisés sur des plus longues durées. Cela entraîne des difficultés pour l’adolescent de partir du service pédiatrique.

 

Le service oncologie de Hautepierre

À l’hôpital de Hautepierre, le service d’oncologie est regroupé avec le service hématologie (maladie du sang). L’espace de ce service forme un U autour d’une salle d’activité. Cet agencement est rare dans un hôpital, car, le plus souvent, ce sont les bureaux des infirmiers qui se trouvent au centre des services. Le service est composé de deux chambres doubles et tout le reste ce sont des chambres simples. Un couloir annexe juxtapose le service. Il s’agit d’un espace stérilisé qui dessert deux chambres stériles. Les parents ainsi que les soignants doivent mettre un masque pour y accéder.

Le temps d’hospitalisation des adolescents dépend de leur pathologie. Il varie de quelques semaines à un an. En ce moment, il y a 2 adolescents de 15-16 ans et 2 adolescents de 12-15 ans. Le service des Grands Enfants est le service où il y le plus d’adolescents.

 

Les adolescents à l’hôpital 

L’image de la maladie pour l’adolescent est différente de celle des enfants ou des adultes. La maladie marque davantage une différence par rapport aux autres alors qu’il est dans une période où l’appartenance à un groupe est très importante. De plus, l’adolescent a un rapport au corps particulier qui peut s’accentuer si la pathologie atteint son apparence physique.

L’adolescent cherche à comprendre sa maladie : « L’ado ressent des choses dans son corps et il voudrait comprendre les choses aussi ». Le plus souvent, il pose les questions aux soignants avant d’en parler avec ses parents. La question de son avenir est une des principales préoccupations de « l’ado-patient ».

Cette question de la transition n’est pas encore clairement établie au sein du personnel soignant. Il semblerait que la transition s’établirait davantage lorsque le patient est en hôpital de jour.

En pédiatrie, il y a un médecin par pathologie ce qui ne laisse pas le choix du soignant aux adolescents. En revanche, cette décision peut s’établir lors de son passage à l’hôpital des adultes, car, généralement, il y a deux médecins par pathologie. Cependant, le choix s’effectue souvent par les médecins eux-mêmes. C’est le médecin qui se sentira le plus à l’aise de gérer un adolescent.

 

– Une journée à l’hôpital

La journée d’un jeune patient est rythmée par les visites des soignants qui prennent la température, la tension et la douleur. L’heure du réveil est flexible. Il est autorisé de dormir jusqu’à 11h. Les infirmières privilégient principalement le matin pour tout ce qui est soin (les pansements …) et la toilette c’est aussi plus le matin (cela est au choix des patients). Le petit déjeuner est collectif. Il se trouve dans l’espace d’activité. Les patients doivent se lever pour prendre le petit déjeuner. C’est le seul repas de la journée qui est collectif

Dans le cadre d’un projet, il est donc préférable d’imaginer des activités pour l’après-midi, car les adolescents ne sont pas disponibles le matin. L’après-midi libre pour les adolescents.

À l’hôpital, les visites sont réglementées et contrôlées pour limiter les risques d’infection. Bien souvent, seuls les parents sont autorisés à entrer dans le service. Les enfants mineurs, comme les frères et soeurs des patients, ne peuvent pas entrer. Les adolescents disposent d’un peu plus d’autorisations que les autres patients. Selon l’état de santé du patient, il est possible pour l’adolescent d’aller en salle des parents pour voir des gens.

– Les activités 

Les adolescents restent souvent dans leur chambre. Ils utilisent la télévision mise à disposition dans leur chambre. Ils sont souvent sur leur ordinateur et communiquent par Skype avec leurs amis. Ils lisent également.

Le professeur de sport organise des rencontres entre les patients du même âge. Cela permet de les faire sortir de leur chambre. Les activités organisées varient : fléchette, billard, …

Il y a l’école à l’hôpital. Ils peuvent même passer des épreuves notamment le brevet et le bac. Il est fréquent que des élèves du collège continuent leur cours à l’hôpital, mais au lycée, il est souvent plus difficile de continuer les cours. Bien souvent, les patients interrompent leurs études et redoublent. Claire-Charlotte nous raconte le témoignage d’une jeune patiente en soins palliatifs qui réclame des cours, car elle aime apprendre et cela lui fait oublier son état très délicat.

Selon Claire-Charlotte, il est possible de faire un espace pour tous les adolescents de tous les services. Cependant, deux problèmes entrent en jeu : c’est que les patients mineurs ne peuvent pas se déplacer seuls dans l’hôpital et ne pourraient donc pas sortir du service. Le second problème est que l’espace est très difficile à trouver dans l’hôpital. Tout l’espace est saturé « même pour avoir un bureau c’est compliqué ». Il faudrait un adulte qui soit responsable de cette salle en permanence comme une aide-soignante, une éducatrice ou la prof de sport.

 

Salle des adolescents 

Dans chaque service, il y a des salles de jeux, un peu près dans chaque service. Dans le service d’oncologie, il y a une salle des adolescents qui a été créée. Elle se trouve à l’extérieur du service. C’est un projet réalisé par la Ligue Contre le Cancer en collaboration avec les adolescents de l’association et l’association L’ARAM il y a 5-6 ans. L’objectif de cet espace était de sortir du côté médical, c’est pour ça que c’est en dehors du service. Pour pouvoir accéder à cet espace, il faut demander la clé aux infirmières. C’est un espace réservé où les parents n’ont pas le droit d’aller pour eux où il peuvent inviter leurs amis.

Cette salle est équipée d’un ordinateur, d’une télévision avec un lecteur de DVD, un frigo et un évier. Il y a un canapé, mais qui n’est pas adapté. Les assises sont trop étroites et trop hautes. C’est plusieurs banquettes qui peuvent se fermer pour faire un « oeuf ». Et on peut même pas s’allonger, car c’est une forme courbée.

Si cette salle était à l’intérieur du service, ce serait plus pratique pour les infirmières. Ce n’est pas pratique qu’elle soit à l’extérieur, car les infirmières ne peuvent pas y aller. Et quand il “bip”, ils doivent revenir dans le service.

Cette salle a été créée uniquement pour les adolescents du service d’oncologie. Les patients qui sont en hôpital de jour montent dans cette salle, car ils ont déjà été hospitalisés et ils connaissent le service. Mais cet espace reste peu utilisé par les adolescents. Il est souvent utilisé par les parents, car leur salle qui leur est réservée est trop petite. Télé, ordi c’est déjà dans leur chambre, mais cette salle permet de changer d’endroit et d’y aller avec un autre ado hospitalisé. “Les ados on en a pas plusieurs touts le temps dans le service oncologie, et selon leur état ils ne peuvent pas toujours sortir de leur chambre”.

Cet espace pourrait être utilisé pour des activités temporaires et occasionnelles par exemple des cours de cuisine, mais faire attention aux pathologies (exemple l’anorexie). Le jardinage c’est compliqué pour des raisons sanitaires. On ne peut pas amener de fleur à l’hôpital à cause des germes. Atelier cuisine dépend de l’image qu’il ont de leur corps anorexique. Atelier artistique.

 

Les parents

Les parents sont admis dans l’hôpital sans restriction. Cependant, ils ne sont pas autorisés à manger dans le service et peuvent dormir que la première nuit d’hospitalisation.

Les parents contrôlent les informations que les soignants donnent aux patients. Cela peut poser des problèmes et entraîner des situations conflictuelles s’il n’y a pas un bon accord entre le patient et les parents. Ainsi, les informations données au patient ne sont pas les mêmes pour tous, l’entourage joue un rôle important. Cette situation peut aussi être inversée lorsque c’est l’adolescent qui veut protéger ces parents.

La salle des parents se trouve à l’extérieur du service. Elle est équipée d’un frigo, d’une plaque de cuisson, d’un micro-ondes. Ainsi, les parents peuvent manger. Cet espace leur permet également d’inviter des proches qui ne sont pas autorisés à entrer dans le service.

 

Les liens 

Il n’existe pas de lien entre les hôpitaux de Strasbourg, ni même avec les hôpitaux d’Alsace. Il y a également des difficultés de communication au sein même de l’établissement, entre les étages du bâtiment pédiatrique.

Les patients n’ont pas non plus de lien entre eux. Ils sont incités à rester dans leur service. Au final, ils vivent dans un endroit qu’ils ne connaissent pas. Dans certains hôpitaux parisiens, un réseau social a été créé pour que les patients puissent se rencontrer et discuter entre eux. D’autres techniques de socialisation des patients ont été réalisés comme un robot qui a une petite tablette pour faire un lien social virtuel avec des enfants hospitalisés en secteur stérile. On peut en venir à se demander si ces liens virtuels peuvent suffire.

 

Nouveau bâtiment à Hautepierre 

L’hôpital de Hautepierre va s’agrandir pour accueillir le pôle cancérologie pour les adultes. Il avait été question de créer une unité pour les adolescents, mais ce projet a été abandonné.

 

Projet à l’hôpital

L’hôpital est constitué de groupe de travail qui permet d’apporter des solutions à des problèmes donnés. Claire-Charlotte travaille dans un groupe qui travaille sur la prise en charge de la douleur. Leur objectif est de mieux informer l’enfant sur les soins et les examens qu’il va subir pour le rassurer ce qui lui permettra d’avoir moins mal. Pour cela, ils essayent de mettre au point une application mélangeant visuels et du son qui présente des bruits de la machine IRM par exemple. Cela permet de rassurer l’enfant et les parents.